Tout le monde l’a oublié, mais c’est un 24 septembre que les Français, peu nombreux (30 % des inscrits), avaient à 73 % validé par referendum l’instauration du quinquennat ‘sec’. Derrière ce record d’abstention se profilait peut-être la démocratie sans peuple que cette modification d’apparence indolore de nos institutions allait entraîner, complétée par une nécessaire modification du calendrier électoral. Bastien Bonnefous signe pour Slate.fr un petit bilan de cette réforme, erreur magistrale pour les uns, progrès pour les autres, dont on se demande encore au bout du compte ce qu’elle a apporté.
Extraits du billet Déjà une décennie de quinquennat, Bastien Bonnefous Slate.fr 24/09/10
La pratique sarkozyste
Ces critiques rejoignent peu ou prou celles qui courent depuis les débuts de la Ve République contre le quinquennat: limiter à cinq ans la mandature élyséenne provoquerait un renforcement de la présidentialisation du régime, un affaiblissement du rôle du Premier ministre, et une négation des droits du Parlement mis à la remorque des décisions. Pour le constitutionnaliste Guy Carcassonne, favorable au quinquennat en 2000, ces arguments ne tiennent pas : «La présidentialisation du régime existait avant le quinquennat. Elle est le fruit de l'élection du président au suffrage universel direct depuis le référendum de 1962. Quant à l'affaiblissement du poste de Premier ministre, sous le quinquennat de Jacques Chirac, les Premiers ministres (Jean-Pierre Raffarin et Dominique de Villepin) ont existé. Actuellement, la situation est plus difficile, mais c'est davantage lié à la personnalité de Nicolas Sarkozy qu'à la durée du mandat présidentiel.» [...]
Reste que l'effet secondaire recherché du quinquennat a été atteint : rendre pratiquement impossible la cohabitation. En faisant coïncider la durée des mandats présidentiel et parlementaire, les institutions se protégeraient du risque de blocage connu à trois reprises sous la Ve République (1986, 1993 et 1997). A moins d'une dissolution inattendue ou du décès imprévisible du chef de l'Etat.
L'inversion du calendrier électoral
En 1999, Jacques Chirac était d'abord hostile au quinquennat. «Le quinquennat serait une erreur, et donc je ne l'approuverai pas», avait déclaré le président lors de l'interview télévisée du 14 juillet. Derrière ce refus, le chef de l'Etat craignait que la coïncidence temporelle avec l'élection parlementaire n'affaiblisse la présidence, dans la lignée de la pensée gaulliste —«Il ne faut pas que le président soit élu simultanément avec les députés, ce qui mêlerait sa désignation à la lutte directe des partis, altérerait le caractère de sa fonction de chef d'Etat», avait jugé De Gaulle en 1964.
Mais en 2000, le même Jacques Chirac présentait la réforme au référendum, contraint à droite par Valéry Giscard d'Estaing qui avait déposé une proposition de loi soutenant le passage au quinquennat, et à gauche par Lionel Jospin qui en avait fait une promesse de campagne en 1995.
Bien plus que le quinquennat, c'est une autre réforme institutionnelle qui a modifié le fonctionnement de nos institutions: l'inversion du calendrier électoral voté en mai 2001 par le gouvernement Jospin, avec l'appui des centristes de l'UDF et contre l'avis de la gauche plurielle de l'époque (Verts, PCF) rejointe par le RPR. Curieuses alliances de circonstance... En décidant que l'élection présidentielle a désormais lieu deux mois avant les élections législatives, les parlementaires sont de facto éclipsés par l'Élysée et soumis à son pouvoir. Ce fut le cas en 2002 et 2007. Ce le sera sans doute encore en 2012.
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Cordialement, Marc Guidoni