Avant de partir en congé et de me laisser gagner par la douce torpeur estivale, je vous avais laissé un os à ronger sur ce sujet si passionnant des relations entre les cultes et les collectivités. Au point de vous les présenter comme autant de querelles d'amoureux.... Ce gredin de Le juge administratif ne s'est lui pas laissé abuser par les sirènes des vacances d'été, livrant le 19 juillet dernier les solutions tant attendues aux questions soulevées sur ce thème depuis plusieurs mois. A quelques heures du ramadan, le bougre !
Aussi, tandis que les échos de la fête de l'Aïd se taisent, je vous présente à mon tour quelques éléments sur ce lot de 5 décisions qui, selon quelques journalistes attentifs, constitueraient un véritable (et nouveau) mode d'emploi de la laïcité pour notre temps. J'y reviendrai sans doute, prenant le temps du commentaire...
Les matières
Les 5 affaires proposaient une diversité de situations, autant du point de vue des cultes concernés que des opérations à évaluer. Leur point commun, nœud gordien du thème qui nous occupe : la contestation de décisions de soutenir un culte, prises par des collectivités territoriales au nom de l'intérêt public local. Se posait ainsi pour l’essentiel dans ces affaires, nous dit le communiqué de presse du Conseil d’État, la question de la conciliation entre des intérêts publics locaux et les principes posés par la loi du 9 décembre 1905.
Les principes
Pour rendre ses décisions, le Conseil d’État s’est appuyé sur les principaux articles de la loi du 9 décembre 1905 :
- « La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l’intérêt de l’ordre public » (art. 1er) ;
- « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l’Etat, des départements et des communes, toutes dépenses relatives à l’exercice des cultes. » (art. 2) ;
- les édifices servant à l’exercice public du culte, ainsi que les objets mobiliers les garnissant, sont laissés gratuitement à la disposition des associations cultuelles formées pour subvenir aux frais, à l’entretien et à l’exercice d’un culte et que celles-ci ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l’Etat, des départements et des communes qui peuvent toutefois leur allouer des sommes pour la réparation des édifices affectés au culte public. La loi autorise également que les personnes publiques propriétaires d’édifices du culte engagent les dépenses nécessaires pour l’entretien et la conservation de ces derniers. (art. 12 et 19)
Les précisions
Pour faire simple, le Conseil d’État a rappelé qu’en vertu de ces dispositions, que s'il est interdit aux collectivités d’apporter une aide à l’exercice d’un culte, elles peuvent :
- financer les dépenses d’entretien et de conservation des édifices servant à l’exercice public d’un culte dont elles sont demeurées ou devenues propriétaires lors de la séparation des Églises et de l’Etat ;
- accorder des concours aux associations cultuelles pour des travaux de réparation d’édifices cultuels.
Les conséquences
- L'orgue de Trélazé
Rien ne fait obstacle à ce qu’une commune qui a acquis, afin notamment de développer l’enseignement artistique et d’organiser des manifestations culturelles dans un but d’intérêt public communal,un orgue ou tout autre objet comparable, convienne avec l’affectataire d’un édifice cultuel que cet orgue sera installé dans cet édifice et y sera utilisé par elle dans le cadre de sa politique culturelle et éducative et, le cas échéant, par le desservant, pour accompagner l’exercice du culte.
- L'ascenseur de la Basilique de Fourvière
L’attribution, par la commune de Lyon, d’une subvention en vue de la réalisation d’un ascenseur facilitant l’accès des personnes à mobilité réduite à la basilique de Fourvière n’est pas contraire à l’interdiction d’aide à un culte posée par la loi de 1905, même si cet équipement bénéficie également aux pratiquants du culte en cause. En effet, cet ascenseur présente un intérêt public local lié à l’importance de l’édifice pour le rayonnement culturel et le développement touristique et économique de la ville, qui justifie l’intervention de la commune.
- L'aménagement d'un lieu d'abattage rituel
La nécessité que les pratiques rituelles soient exercées dans des conditions conformes aux impératifs de l’ordre public, en particulier de la salubrité et de la santé publiques, justifie légalement, en l’absence d’abattoir proche, l’intervention de la collectivité territoriale. (décision Communauté urbaine du Mans)
- Mise à disposition d'un local pour l'exercice d'un culte
Une commune peut, dans le respect des principes de neutralité et d’égalité, permettre l’utilisation d’un local qui lui appartient pour l’exercice d’un culte si les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte. (décision Cne de Montpellier)
- Faciliter la réalisation d'un édifice religieux
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Cordialement, Marc Guidoni