Manifs, lettres ouvertes, l’œil de toutes les télés du monde, un coup de fil du Président de la République, combien de milliers de tweets, et désormais, comble de la célébrité, un billet sur ce blog. Chère Léonarda, tu n’en demandais pas tant, sans doute, alors que tu profitais de ta sortie scolaire dans le bus, entourée de tes ami(e)s.
Si je reprends le clavier pour ces quelques lignes après plusieurs mois de silence, ce n’est sans doute pas pour en ajouter aux klaxons et sirènes qui ont accompagné cette jeune fille. Mais je ne peux pas m’empêcher de poser une question.
Elle ne portera pas sur le fond, sur le dossier, ni sur l’intervention de François Hollande ni sur les invectives des leaders de la majorité qui tentent en pleines vacances scolaires rallongées d’obtenir des jeunes qu’ils descendent dans la rue pour prier Léonarda de revenir, comme autant de Monsieur Seguin criant après sa chèvre.
Les médias ont été précis. Si cette reconduite à la frontière était légale, la méthode employée (la rafle à la sortie de l’école) ne l’était pas, du fait d’une circulaire sans doute normative qui priait les agents des forces de l’ordre de faire leur travail avec un peu plus de délicatesse. Une circulaire aujourd'hui "renforcée".
Mais que reste-t-il de la délicatesse quand il faut faire du chiffre ? Quand votre prime dépend de vos résultats ? Quoi de plus facile pour cocher les cases que des affaires facilement résolues ? Ainsi, pour améliorer ses résultats, par exemple en trouvant aisément par hasard une famille en situation irrégulière, il suffit de se présenter à la sortie de l’école, à l’heure des papas et des mamans. Et hop : same player shoot again !
Alors, dans le concert médiatique, je pose une question inaudible aux forces de l’ordre. Pourquoi êtes-vous intervenus ? Pourquoi n’avez-vous pas désobéi à cet ordre indélicat, qui vous envoyait quérir cette fille et sa famille au pied du bus ? Il y a plus de 60 ans, quand la République moribonde envoyait ses policiers dénicher les juifs dans la campagne, d’autres que vous, courageux ou téméraires, ont pensé qu’ils étaient chargés de les chercher, mais pas de les trouver. Et eux n’étaient pas protégés par le statut du fonctionnaire.
Ce ne sont pas les premiers ordres illégitimes que le pouvoir vous adresse depuis quelques mois. Souvenez-vous de vos prédécesseurs, et du jugement de l'Histoire. Car aujourd'hui votre statut, gens des forces de l’ordre, non pas vous permet mais vous donne le devoir de désobéir, lorsque l’ordre que l’on vous sert vous conduit à rompre le pacte républicain. On vous dira, « oui mais, encore faut-il que cet ordre soit manifestement illégal et de nature à troubler l’ordre public ! ».
Manifestement, certes c’est plus lisible à posteriori, ces conditions sont remplies. Sans parler du discrédit que jette cette affaire sur l'Etat. Espérons que l’on ne vous y reprenne plus, à peine de voir notre pays oublieux des années noires de son histoire, les revivre. Car tous alors, appliquaient bien la loi...
N'oubliez jamais que tout ce que
Hitler a fait en Allemagne était légal.
Martin Luther King
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Cordialement, Marc Guidoni